Commentaires des pièces de cette messe par Dom Baron.

INTROÏT

LE TEXTE

Versez votre rosée, cieux, d'en haut, et que le nuages pleuvent le Juste.
 Qu'elle s'ouvre, la terre, 
Et qu'elle germe le Sauveur.

Ps.- Les cieux disent la gloire de Dieu
Et l'œuvre de ses mains, il la proclame, le firmament. Isaïe, XLV, 8 - Ps. XVIII, 2.

Au chapitre XLV, Isaïe rapporte ce qu'il a entendu le Seigneur dire à Cyrus, qu'il va susciter pour être son christ, sauver le peuple et rebâtir la cité et le temple. A la vision de ce sauveur d'un moment, par delà lequel il voit le Messie et son œuvre éternelle, il est transporté et, interrompant sa prophétie, lance vers le ciel son désir ardent pour que soit bâtie la venue des deux libérateurs. Il le fait sous la forme poétique de la rosée qui fait germer la plante, symbolisant ainsi l'action divine qui fera de Cyrus et du Christ des sauveurs parfaits.

Au sens liturgique, c'est l’Église qui appelle le Messie. Rien n'est à changer dans l'image du prophète, mais il faut lui donner tout son sens divin. La rosée sollicitée du ciel, c'est l'action fécondante du Saint-Esprit ; la terre, c'est Notre-Dame, fleur de la race, qui s'ouvre au sommet de la tige de Jessé et qui, fécondée sous l'ombre mystérieuse de l'Esprit du Très-Haut, va produire son fruit divin ; le Verbe fait chair.

Cette prière admirable et tout à fait à sa place le Mercredi des Quatre-Temps, tout entier consacré à l'Annonciation. Il faut lui garder ici la même interprétation ; d'autant que, par l'Offertoire et la Communion tout au moins, le mystère continue d'être fêté. Et il faut la chanter comme la prière suprême, entendue de Dieu par delà les siècles, et qui a contribué à faire venir plus tôt l'heure du Messie et de Notre-Dame ; mais aussi, comme la supplication qui va mériter aux âmes de recevoir le Verbe fait chair quand il va revenir et de se livrer à l'influence de son Esprit comme la terre à la rosée, lui donnant ainsi ce qu'il attend d'elles pour réaliser la plénitude de son Incarnation.

Le Psaume, lui, n'est pas une prière ; il est la constatation joyeuse des merveilles de Dieu qui se réalisent dans le mystère.

LA MÉLODIE

Une prière ardente de deux phrases qui s'opposent ici, encore, suivant le texte, comme le ciel et la terre.

La première est un admirable mouvement de l'âme portant on désir, comme dans le graduel. Qui sédes, aussi haut que possible, jusqu'aux nuées fécondes d'où va venir la céleste rosée, puis redescendant douce et paisible comme descendra le Juste qu'elle chante. La supplication est ardente sur le pressus de caeli, les quilismas de désuper, le pressus de pluant, mais il n'y a pas d'inquiétude, de doute, d'angoisse ; au contraire, une grande sérénité et une joie discrète se mêlent partout à la prière dans la tonalité claire du mode de fa ; la joie de l'Eglise qui sait, car elle en jouit déjà, tout le bonheur qu'il y a pour elle dans cette pluie fécondante qu'elle sollicite.

La seconde a moins d'élan. C'est la terre que l'Eglise regarde et encore qu'il s'agisse de Notre-Dame, ce chef-d'œuvre de grâce qui va produire la nature humaine du Christ, n'est-elle pas tout en bas par comparaison avec l'infinie perfection du verbe qui va y descendre ? Et puis, c'est le mystère dont la profondeur ne saurait se chanter ; Aussi, après l'ardeur de la supplication sur aperiatur, la mélodie revient-elle au mode de ré, et en des neumes qui s'effacent de plus en plus, elle s'éteint, gracieusement d'ailleurs, sur Salvatorem, le mot du désir.

La deuxième note de ra dans Rorate doit être élargie. Le crescendo de la première incise sera ardent mais sans éclat ; c'est une prière. Bien accentuer nubes et aller sur le pressus de pluant en progression.

Veiller à ce que tur dans aperiatur ait bien sa valeur et qu'on ait le temps d'articuler. Térra sera légèrement retenu ainsi que les quatre dernières notes de gérminet.

Le Psaume sera chanté dans un bon mouvement et pénétré déjà de la joie du « Gloria in excelsis » qu'il prophétise.

GRADUEL

LE TEXTE

Il est proche, le Seigneur,
De tous ceux qui l'invoquent,
De tous ceux qui l'invoquent dans la vérité.

Verset. - La louange du Seigneur,
Elle la chantera, ma bouche,
Et que toute chair bénisse le Seigneur. Ps. CXLIV, 18, 21.

Dans la première partie, le psalmiste exprime une idée très simple ; à savoir que le Seigneur est tout disposé à écouter ceux qui le prient. Toutefois, il a précisé d'un mot : ceux qui le prient dans la vérité ; c'est-à-dire qui lui demandent, en toute sincérité, des chose vraies ; entendons : ceux qui sont conformes à sa volonté, car la vérité, c'est, en même temps, ce que Dieu pense et ce que Dieu veut.

Le Verset, lui, est un hommage de reconnaissance de l'âme qui promet à Dieu une louange sans fin en retour de la bienveillance qu'il lui témoigne.

Au sens liturgique, peut-être serait-on porté à s'appuyer sur les premiers mots Prope est Dominus pour faire entrer ce texte dans le cadre de l'Avent. Ce ne serait pas absolument exact car c'est en tout temps que le Seigneur exauce ceux qui savent le prier. Il ne faut pas non plus le rattacher à l'Epître qui vient d'être lue, mais à l'Epître du mercredi précédent pour laquelle il a été choisi. Dans cette Epître, on nous ait entendre l'histoire d'Achaz qui, par manque de confiance, refusa de demander un prodige au Seigneur et qui reçut, en réplique, d'Isaïe la fameuse prophétie qui annonçait le prodige des prodiges : « Le Seigneur vous donnera lui-même un signe : Voilà qu'une Vierge concevra et enfantera un Fils et son nom sera Emmanuel ». A la fin de ce récit, ces deux versets viennent sur es lèvres de l'Eglise comme une sorte de réflexion. Repliée sur elle-même et gardant bien présent à l'esprit tout ce qu'elle vient d'entendre, elle se dit : Achaz a eu tort...Le Seigneur est tout près de ceux qui l'invoquent et bientôt il sera plus près d‘eux encore ; car le prophète a dit que Celui qui doit venir aura nom Emmanuel, ce qui veut dire : Dieu est avec nous.

Cette annonce précise de l'Incarnation amène alors la grande louange du Verset. Laudem Domini...

LA MÉLODIE

(V) Prope est Dominus omnibus invocantibus éum omnibus qui invoquant éum in verita te.

Elle est composée de trois formules : celle de Prope est Dominus et les deux de éum. Ces formules sont reliées entre elles par les motifs presque syllabiques de omnibus invocantibus et de omnibus qui invoquant. Un seul mot est original, in veritate, encore s'achève-t-il en une formule finale commune.

Le fait qu'elle est à ce point centonisée n'empêche pas qu'elle soit très expressive. L'auteur s'est servi de formules toutes faites mais il les a choisies pour le texte et les a disposées de telle sorte qu'elles puissent en exprimer au mieux le contenu. Notez qu'elles sont placées sur les mots importants : Dominus, le nom divin, et éum qui le représente ; et que, par le contraste que font leurs neumes avec les motifs syllabiques qui les entourent, elles les mettent en particulier relief. Aussi bien est-ce le mot de l'Epître : Pete signum a Domino, dit Isaïe. Non tentabo Dominum, répond Achaz. Propter hoc dabit Dominus ipse vobis signum, réplique le prophète.

L'intonation est grave. (Cette formule n'est employée que sur le mot Dominus ; de sorte qu'elle est moins une formule centon qu'un motif réservé uniquement au nom du Seigneur, comme plusieurs autres.) Mais ce serait une erreur d'y voir la moindre tristesse. Au contraire, on y discerne déjà en une nuance discrète la joie qui se dégage du texte et qui caractérise tout le Graduel. Toute pénétrée de respect, elle se retient, s'efface, sur le nom divin, mais, sitôt après, elle se laisse aller, se développe sur omnibus invocantibus et va s'épanouir sur éum en un bel élan qui se détend dans la plénitude de la cadence en fa. Elle passe dans la seconde phrase, s'élève avec grâce sur omnibus, puis redescend dans le grave où elle se revêt à nouveau sur éum d'une certaine révérence qu'elle garde jusqu'à la fin.

Le Verset. - Laudem Domini loquétur os méum Et benedicat omnis caro nomen sanctum éjus.

La joie est ici enthousiaste. Lancée avec une ferme assurance sur la distropha de Laudem, elle se développe en une sorte de contemplation sur Domini : légère, souple, heureuse. Une nuance de tendresse plus marquée passe avec le si b, puis l'exaltation, grandissant à nouveau, va vers loquétur os méum où elle atteint toute sa puissance d'expression sur les mots mêmes qui disent la joie de pouvoir chanter à jamais.

L'enthousiasme est le même dans la seconde phrase. Sitôt qu'elle a été ramenée à la dominante, la mélodie s'élance à l'extrême limite du mode, enveloppant de toute sa puissance l'ardent souhait de l'Eglise. Elle s'y arrête d'ailleurs ensuite en un gracieux mouvement descendant, puis, pour finir, se pénètre à nouveau de tendre respect sur nomen sanctum éjus.

Comme on le voit, ce verset a un caractère de joie éclatante qui ne s'est pas encore rencontré au cours de l'Avent. L'auteur a-t-il voulu donner là comme une première annonce de la joie de Noël et en pénétrer déjà l'âme des fidèles ? On a d'autant plus de raisons de le croire que les formules 53 et 54 sont particulières à la période de la Nativité. On les trouve ailleurs, mais elles sont si fréquemment répétées au temps de Noël qu'elles contribuent, sans aucun doute, pour leur part, à créer l'atmosphère musicale. El semble que ce soit comme le début d'un crescendo de joie qui, parant du Mercredi des Quatre-Temps, jour consacré à l'Annonciation, jour de l'Incarnation, atteint toute sa puissance aux jours de Noël et de l'Epiphanie.

Ne pas chanter l'intonation avec des effet de basse, mais avec la simplicité et la douceur qui conviennent à une contemplation paisible. Le crescendo est le premier éum sera discret et mené dès le début de l'incise ; C'est une formule assez délicate mais très expressive. Il y a sur le do une distropha, puis al première note de la clivis ou du climacus ; les distrophas seront posées doucement et la voix, renforcée, ira vers la note qui suit pour la répercuter, délicatement. Il s'en suivra une onction pénétrée de ferveur qui servira admirablement le pronom éjus qui tient la place de Dominus.

Retenir quelque peu veritate ; la tristropha, douce. Bien distinguer dans la vocalise qui suit, sur le la, les deux distrophas, du pressus ; lles reçoivent doucement le posé de la voix ; de même celle qui se trouve sur le do dans la dernière incise.

C'est une bivirga qu'il y a sur Laudem au début du Verset ; qu'elle soit appuyée, forte et bien lancée. Sur Domini, deux distrophas et répercussion sur la première note de la clivis ; même interprétation que plus haut. Une bivirga avant les deux climacus qui finissent la première phrase ; bien accuser la première note du second.

La tristropha de os, légère. Bien pendre grade à donner toute leur valeur aux trois notes qui précèdent les notes doubles de méum ; les retenir légèrement évitera le danger d'en faire un triolet. Poser nettement l'épisème vertical de omnis, allonger même un peu la note. (Dans plusieurs cas, la 2ème note est un quilisma.) Un gracieux ralenti sur sanctum, qui se poursuivra sur éjus jusqu'à la fin.

ALLELUIA

LE TEXTE

Viens, Seigneur et ne tarde pas.
Pardonne les péchés de ton peuple.

Cette phrase ne se trouve pas dans l'Ecriture. L'idée en est très simple et s'applique sans difficulté à l'un ou à l'autre des sens de l'Avent. C'est une prière dont l'objet est nettement déterminé : la prière de tout le peuple de Dieu, de toute l'Eglise, suppliant le Christ de venir sauver le monde.

LA MÉLODIE

On la rencontre deux autres fois au cours de l'année : le XXe Dimanche après la Pentecôte (Alleluia Paratum cor méum) et à la messe Loquebar d'une Vierge Martyre (Alleluia Adducentur).

Elle commence dans le grave et se meut lentement dans toute la première phrase, comme la prière très humble du pécheur qui n'ose pas lever les yeux, accablé qu'il est sous ses fautes. Ce n'est que dans la seconde incise qu'elle prend un peu d'ardeur, il y a sur et noli tardare un très bel accent de pressante supplication.

Dans la seconde phrase, la prière est plus aisée sur relaxa. La longue vocalise de facinora est, en elle-même, assez indifférente, mais elle prend, avec les mots, un caractère de prière fort bien adapté. Il y a, dans la répétition du motif initial, une progression qui fait la supplication de plus en plus forte. La première fois, elle monte par trois degrés au si b ; la seconde fois, par un seul mouvement de quarte, elle atteint le do qu'elle marque d'un pressus ; la troisième, elle s'y pose sans préparation et y demeure trois temps. Il y a là une vigueur accrue du plus heureux effet. La mélodie redescend ensuite dans le grave et finit sur une formule propre à certains graduels du Ier mode, elle aussi très priante et très humble, avec une touche assez marquée de crainte révérentielle.

L'Alleluia, lui, est du IIIe mode, mais l'unité demeure parfaite et l'expression y trouve son bien. L'Alleluia ayant en lui-même un caractère de louange que le contraste rend plus marqué encore.

Prendre garde de faire trop longue la double note initiale de l'Alleluia, lequel doit avoir un certain mouvement. Bien balancer le rythme de l'arsis ; la vocalise légère.

Veni Domine tranquille et discret. Crescendo sur noli ; tardare sans éclat. Noter que, dans les thésis de la seconde phrase, toutes les notes doubles sont des distrophas, légères donc ; de même les deux qui précèdent la clivis sur le do, à la dernière reprise du motif. Par contre plé dans plébis est une bivirga. Lier avec soin les grands intervalles de l'avant-dernière incise.

OFFERTOIRE

LE TEXTE

Salut, Marie, de grâce remplie,
Le Seigneur (est) avec toi.
Bénie (es-)tu entre les femmes,
Et béni le fruit de ton sein.

C'est la salutation de l'Ange Gabriel à Notre-Dame et celle d'Elisabeth combinées en un seul texte, lequel forme la première partie de la Salutation angélique. Il n'y manque que le dernier mot, Jésus, qui d'ailleurs ne fut pas dit par Elisabeth.

Au sens liturgique toutefois, ce n'est ni l'Archange ni Elisabeth qui saluent Notre-Dame ; la combinaison des deux salutations en un seul texte s'y oppose. C'est toute l'Eglise qui, au moment où est commémorée la Conception de Notre Seigneur, fait monter sa louange vers celle que Dieu a choisie pour sa mère. Elle a entendu, au cours de la semaine écoulée, le mercredi, le récit de l'Annonciation, le vendredi, celui de la Visitation ; elle recueille, sur les lèvres de l'Archange et d'Elisabeth, les paroles inspirées pour les redire à Notre-Dame, comme l'hommage le plus parfait qu'elle puisse rendre à sa sainteté incomparable et à sa maternité divine.

Bien noter que c'est une salutation. Ceci implique que les chanteurs soient en communication directe avec Notre-Dame : qu'ils chantent pour elle et qu'ils aient conscience que du haut du ciel, elle les écoute et reçoit leur hommage dans la joie de son cœur maternel.

LA MÉLODIE

Quatre phrases (Ave Maria gratia plena ne forme qu'une seule phrase. La grande barre qui suit Maria doit être considérée comme une demi-barre). Les trois premières, en progression l'une sur l'autre, conduisent l'idée jusqu'à Benedicta tu, point culminant de la louange. La quatrième redescend vers le grave où elle s'achève dans la contemplation du mystère.

Il n'y a pas d'éclat dans l'Ave de l'intonation ; c'est un salut gracieux enveloppé de vénération profonde et tendre. Tout le long de la première phrase, l'âme se complaît dans cette attitude d'humble hommage ; elle s'anime seulement, d'un accent de ferveur, sur le nom béni. Un bel élan, habilement préparé, porte la syllabe accentuée de Maria à la dominante où les notes doubles et répercutées mettent un peu plus d'ardeur, d'admiration et d'amour. Mais ce n'est qu'en passant. Elle revient au grave sur gratia pléna et s'y enveloppe plus encore de contemplation ; aussi bien y a-t-l ici quelque chose de plus que la salutation. C'est déjà le mystère, le mystère indicible de l'Immaculée. La phrase s'achève sur pléna par un pressus qui met bien en valeur ce mot de plénitude, qui ne peut se dire que du Christ et de sa Mère.

Dès le début de la seconde phrase, la mélodie, établie sans préparation sur la dominante, prend tout de suite une allure de louange éclatante. C'est une qualité nouvelle que l'Eglise salue en Notre-Dame : son union avec Dieu. La plénitude de la grâce, c'est déjà le Seigneur avec l'âme ; mais, sur les lèvres de l'Archange, le Dominus técum indiquait une modalité spéciale de l'union divine. Le Seigneur est avec Notre-Dame comme il n'est avec personne. C'est de cette union merveilleuse que l'Eglise félicite Marie. La mélodie la sert admirablement. Le s'épanouit sur Dominus en un beau motif plein d'élan, deux fois répété, qui dit l'admiration enthousiaste que provoque l'infinie grandeur de Dieu, tandis que, sur técum, elle se retient comme recueillie, étonnée, confondue d'admiration, devant l'ineffable sainteté de Notre-Dame.

Elle se reprend sur Benedicat tu pour s'élancer cette fois à la limite de son étendue. C'est le troisième mot de a louange. Il est la conséquence des deux autres. C'est parce qu'elle est pleine de grâce et que le Seigneur est avec elle que Marie est bénie entre toutes les femmes ; nouvelle Eve, celle que toutes les nations diront Bienheureuse. La mélodie le met au-dessus de tout ; elle dépasse la dominante, monte et plane, à loisir, dans les hauteurs, s'appuyant sur des notes doubles et des pressus qui lui permettent de déployer toute sa puissance et de colorer d'accents de ferveur ce mot de bénédiction. Il s'achève sur le pronom tu en une belle cadence pleine et large qui va tout droit à Notre-Dame avec une nuance délicate de tendresse. La seconde incise ramène à la dominante le mot muliéribus. L'admiration s'y prolonge, toujours fervente ; notez le pressus et le torculus avec son mouvement hardi de quarte retombant sur la bivirga de la syllabe accentuée. D'une façon assez inattendue, la phrase s'achève par une cadence en demi-ton sur si qui laisse la mélodie en suspens, comme si l'Eglise, évoquant en une sorte de contemplation toutes les femmes de la race, les voyait se perdre en une perspective infinie, tendues en un geste de bénédiction vers Notre-Dame  qui, de très haut, enveloppée dans la gloire du Verbe Incarné, les domine toutes de l'éclat de sa maternité.

La quatrième phrase est, de toutes, la plus profonde. Ici, c'est le mystère ; le mystère du Verbe fait chair dans le sein de Notre-Dame. La mélodie abandonne les hauteurs, descend par degrés, sur benedictus qu'elle souligne seulement d'un pressus, descend encore sur fructus, puis demeure dans le grave, presque sans se mouvoir. Un motif deux fois répété de quelques notes qui montent et descendent par degrés conjoints sur véntris, un dernier pressus sur tui comme pour faire rejaillir la gloire du Fils sur la Mère - car c'est pour le Fils qu'est toute la louange dans cette dernière phrase - et c'est tout. L'ineffable ne saurait s'exprimer.

Il faut chanter avec beaucoup de souplesse. On y veillera particulièrement dans l'intonation. Le climacus qui s'achève sur la première note pointée sera légèrement retenu pour donner à cette demi-cadence sur mi toute sa valeur d'admiration gracieuse et tendre.

Chanter Maria avec beaucoup de ferveur. Les deux premières notes de ri bien appuyées, assez fortes, avec l'élan de l'accentuation : ce sont deux virgas ; les deux autres sont des distrophas ; la répercussion en sera délicate et il y aura un crescendo jusqu'à la répercussion, très délicate aussi, de la virga. La cadence sur sol très peu ralentie, de façon à rattacher Maria à gratia pléna. Une pause.

Discret a tempo au départ de Dominus dont les thésis seront légères, comme le sera la tristropha de técum, qu'on renforcera toutefois pour la lier au climacus. Sur ne dans Benedicta, une bivirga, bien l'appuyer et mener le crescendo e un bel enthousiasme vers le pressus. Conduire avec mesure l'admirable descente de benedictus fructus, sans que la voix perde brusquement de sa sonorité. Véntris tui très lien avec le salicus bien doux.

COMMUNION

LE TEXTE

Voici qu'une Vierge concevra
Et enfantera un Fils,
Et il sera appelé de son nom Emmanuel. Isaïe, VII, 14.

Cette parole fut dite comme une prophétie par Isaïe à Achaz. « Le Seigneur vous donnera lui-même un signe : voici qu'une vierge enfantera... » Le signe promis arrivera le jour de l'Annonciation. C'est le mot même du prophète en effet que l'Archange dit à Notre-Dame : « Voici que vous concevrez et enfanterez un Fils et vous lui donnerez le nom de Jésus ».

Ce texte est tout à fait à sa place le jour où est commémorée l'Annonciation. Toutefois il ne semble pas qu'il doive être chanté ici comme une prophétie ; c'est l'Eglise qui après avoir entendu la parole du Prophète à l'Epître, et celle de l'Ange à l'Evangile, y revient, au moment de la communion. Contemplant dans la lumière de la grâce sacramentelle, l'Incarnation qui se prolonge par l'Eucharistie dans tout le Corps Mystique, elle chante la joie de l'Emmanuel, du Dieu avec nous, en même temps que le mystère de Noël dans lequel à nouveau va s'accomplir mystiquement la parole divine.

LA MÉLODIE

Une joie émerveillée ; on en caractériserait bien ainsi, en deux mots l'expression. Elle est très discrète dans sa première incise, avec quelque chose de recueilli, de contemplatif, répandu sur toute la thésis de concipiet. Dans une sorte de jouissance profonde, l'âme admire le mystère de la Vierge Mère.

Et voilà qu'elle s'anime et que son admiration prend de l'ampleur. Un souffle puissant passe, qui emporte les mots dans l'enthousiasme, Filium après pariet, comme si l'âme, de plus en plus éclairée, réalisait ce qu'est le mystère de la maternité divine.

Mais, à peine a-t-elle saisi cette seconde merveille, qu'une troisième s'offre à elle : le mystère de Dieu avec nous cette fois, et vocabitur Emmanuel... Elle n'a pas le temps de s'arrêter si peu que ce soit ; de la première phrase, le souffle d'allégresse passe dans la seconde, l'entraînant dans la progression jusqu'à la distropha de vocabitur. Là quelque chose change. Le mystère s'étend. Il s'étend jusqu'à l'âme. Elle sent qu'elle y entre, en ce moment de la communion. Elle se recueille, se refermant sur les merveilles qui s'opèrent en elle. La mélodie la suit dans sa contemplation. Elle n'a plus le souci des notes éclatantes, ni des mouvements à grand espace ; elle se retient. Notez les clivis allongées de vocabitur, elle descend peu à peu vers le grave, jusqu'à ce qu'elle arrive à Emmanuel, le mot du mystère. Elle s'y complaît, en une formule qui, comme celle du véntris tui de l'Offertoire, se contente de quelques notes conjointes qui descendent et montent mais où passe toute la tendresse de l'âme pour l'Hôte divin qui est avec elle.

L'intonation paisible ; de même concipiet dont les podatus seront bien posés. Ceux de pariet aussi, tout le sommet en sera élargi. Le lier étroitement à Filium qui sera à peine retenu afin que l'enthousiasme aille croissant sur et vocabitur. C'est une bivirga qu'il y a sur vo. Retenir quelque peu tur. Beaucoup de grâce et de ferveur sur Emmanuel, qui sera très ralenti.

 

Epître, évangile et préface chantés de cette messe, voir ici

Commentaires des pièces de cette messe par Dom Baron.

 

LEÇONS DES MATINES : Nathan reproche à David son péché (II Rois XII)

Épître : Nous sommes ensevelis dans le Baptême pour mourir, afin que, comme le Christ ressuscité, nous marchions dans une vie nouvelle. (Rom. VI. 3, 11)

ÉVANGILE : Multiplication des pains (Marc VIII. 1, 9)

IDÉE centrale : Il semble que ce soit l’idée de notre incorporation au Christ qui se dégage de l’ensemble des textes.

La collecte nous fait demander en premier lieu que Dieu insère en nous – notez le mot insérer – l’amour de son nom ; c’est-à-dire sa puissance d’aimer qui est l’Esprit du Christ. Caritas Dei diffusa est in cordibus vestris per Spiritum Sanctum ; puis qu’il augmente en nous la religion : la vertu qui nous unit à Dieu à travers le Christ ; alors, en retour, Dieu, par sa grâce, nourrira et conservera en nous ce qui est bon. En quelques mots, c’est toute notre transformation dans le Christ que l’Église sollicite là pour nous.

C’est cette transformation que St Paul nous présente dans l’Épître. Elle s’opère par le Baptême, mais comme en deux stades. Le premier, nous appliquant les mérites de la mort du Christ, ensevelit avec lui dans sa mort le principe de notre vie de péché. Le second insère en nous sa vie de ressuscité : cette puissance qui lui fait connaître le Père, l’aimer et trouver en lui sa Béatitude.

Ce deuxième stade est l’effet propre de l’Eucharistie dont la grâce nous est appliquée à l’avance lorsque nous recevons le Baptême. L’Évangile nous remet en mémoire la première annonce qui fut faite de ce sacrement de vie. Le Christ nous donne la pain qui nourrit précisément l’union établie entre lui et nous qui doit croître jusqu’à l’éternité où elle s’épanouira en plénitude et à jamais.

INTROIT

LE TEXTE

Le Seigneur est la force de son peuple et le protecteur qui sauve son Christ. Sauve ton peuple, Seigneur, et bénis ton héritage. Et gouverne les tiens jusqu’au siècle sans fin. Ps. – Vers toi, Seigneur, je pousserai mon cri. Mon Dieu, ne sois pas silencieux à mon égard. De peur, que si tu ne me parles pas, je sois assimilé à ceux qui descendent vers le lac. Ps. XXVII. 8, 9, 1.

L’ordre de ces trois versets est ici interverti. Le Psaume XXVII en effet est d’abord une prière personnelle : « Je crierai vers toi Seigneur »… Ce n’est que dans la dernière strophe que le Psalmiste se met à prier pour le peuple et pour le Roi : Christus, le consacré du Seigneur et son représentant. Dans cette prière pour tous – qui forme ici le corps de l’Introït – il y a deux idées. D’abord un acte de confiance en la puissance protectrice de Dieu : « Le Seigneur est la force de son peuple… », puis la supplication proprement dite ; « Sauve ton peuple, bénis-le, guide-le… »

Il n’y a rien à ajouter à leur sens littéral pour faire entrer ces versets dans la liturgie de ce Dimanche ; il faut seulement les adapter au « jeu ». C’est l’Église qui prie. Elle fait d’abord confiance à Dieu qui est sa force et qui la protège, car Christi sui doit être entendu du Christ et de tous ses membres. Après cette affirmation de sa foi, elle demande d’être sauvée, bénie, guidée par Dieu qui est à la fois son Seigneur et son Père.

L’objet de la prière est d’ordre général mais il reste loisible, et c’est facile, de le préciser en le faisant rejoindre l’idée centrale de la messe. C’est alors une plus parfaite incorporation au Christ que l’Église demande pour ses membres. Être sauvé dans le Christ, béni dans le Christ, guidé à travers le Christ, vers le Père, ce n’est pas autre chose, en effet, que d’être en lui et un avec lui.

Le Psaume, avec son caractère de prière personnelle, rentre ici dans la prière collective avec le même objet.

LA MÉLODIE

La première phrase est assurée, ferme comme une proclamation. Bien posée dès le début sur le salicus de Dominus, la mélodie monte sans exaltation, mais animée d’une joie antérieure qui la fait s’épanouir en un très bel accent de sécurité forte et de fierté heureuse sur la double note de plebis tuae. Dans l’incise qui suit, la joie s’y mêle, une joie paisible qui domine peu à peu dans les neumes à grands intervalles jusqu’à ce que vienne Christi sui, le nom béni du consacré ; alors, une vénération aimante enveloppe les neumes qui, par degrés conjoints, et retenus par le quilismas et la cadence descendent vers le grave, prostrant l’âme en adoration.

La deuxième phrase est toute prière. Du la grave, où l’avait conduite l’humble respect pour le Christ, la mélodie remonte dans un élan modéré mais fervent vers le pressus du fac, puis redescend, pour s’élever à nouveau, plus pressante cette fois, sur tu et sur Domine qu’elle établit sur la dominante en leur donnant un accent qui insiste, mais dans une sérénité accrue.

C’est cette paix heureuse que donne l’assurance d’être entendu favorablement, qui caractérise la dernière phrase. Il n’y a presque plus de pression ; l’Église sait qu’elle a pour elle les promesses du Christ, elle ne fait plus, semble-t-il, que les rappeler au Père. Notez benedic hereditati qui s’impose presque, avec tout juste une nuance délicate qui sourit plus qu’elle ne demande, et rege eos avec l’accent léger, joyeux de rege et la tristropha qui enveloppe de douceur eos – les siens -, et pour finir la belle cadence de usque in finem qui évoque, en l’élargissant, le genui te si aimable de l’Introït de la Messe de minuit. Aussi bien, tous les mots qui désignent le Corps Mystique, sont enveloppés de tendresse et de force : plebis suae christi sui, populum tuum hereditati tuae, eos.

GRADUEL

LE TEXTE

Retourne-toi (vers nous) Seigneur. Jusques à quand? (seras-tu irrité ?) Et sois propice à tes serviteurs. Verset. – Seigneur, un refuge tu t’es fait pour nous, de génération en génération. Ps. LXXXIX. 13, 1

Le Psalmiste dans le Psaume LXXXIX, après avoir demandé au Seigneur de ne pas rester détourné de son peuple, lui pose une question, qui est en même temps une plainte et une prière délicate : « jusques à quand resteras-tu fâché ? » Puis il insiste à nouveau pour qu’il le protège, comme il l’a fait, de génération en génération.

Il n’y a rien à ajouter ici à ce sens littéral.

Ce Graduel est chanté une première fois le samedi des Quatre-Temps de Carême après la troisième leçon. Il est vraiment à sa place au début de cette période de pénitence. Ici de même, après l’Épître. Saint Paul nous dit que, par le Baptême, nous avons été plongés dans la mort du Christ. Nous y restons plongés et, chacun le sait, ce n’est que très lentement que cette mort tue en nous les concupiscences mauvaises, parce que, à chaque instant, nous retournons, sérieusement ou à la légère, à la vie de péché. Sortir ainsi du Baptême, c’est sortir du Christ, ou s’en éloigner, ou, tout au moins, se soustraire à son influence. Nous faisons ainsi Dieu se détourner plus ou moins de nous.. malgré lui. C’est le pardon de ces infidélités à notre Baptême que nous demandons au Seigneur. Qu’il se retourne une fois de plus et, sa grâce aidant, nous nous replongerons dans sa mort continuant de mourir en lui, pour vivre avec lui, à jamais.

LA MÉLODIE

Dès l’intonation, elle est très priante, avec la double note – une bivirga épisématique – qui conduit la voix en progression vers la suivante, retenue, elle, par le quilisma. Il y a là une insistance, à la fois humble et pressante. La belle formule de Domine, que nous avons déjà trouvée dans le graduel Propitius esto, dimanche dernier, vient s’y joindre et continuer délicatement la pression. La mélodie, nettement établie en la, s’élève alors, ardente, sur aliquantulum. C’est un très beau motif, que la double note du début et la grande montée de la cadence font fort et suppliant. Il rend fort bien le ton direct de cette question qui est à la fois une prière et une plainte.

La mélodie se détend ensuite sur deprecare, non sans un retour à la dominante, très heureux d’ailleurs car il met sur le mot un bel accent de prière. Mais c’est peut-être sur la distropha et la répercussion de la cadence finale que la supplication est la plus émouvante.

La formule de Domine est celle de Pro patribus dans le Graduel Constitues eos. Nous l’avons déjà trouvée dans le Graduel Benedictus es du Dimanche de la Sainte Trinité. Elle formait là une très belle louange. L’auteur, ici, en supprimant la montée de fa à do et en attaquant directement sur la dominante, en a fait une admirable prière. Le contact immédiat avec le si par le do et le la lui donne en effet une nuance de mineur qui, pour être fugitive, ne lui donne pas moins quelque chose de plaintif qui la fait délicatement suppliante, jusqu’à ce qu’elle retrouve la fa et sa sérénité ; sérénité fugitive, elle aussi, car la supplication monte à nouveau et devient, sur les doubles notes de refugium, d’une ardeur qui touche à la véhémence, ardeur qui se renouvelle d’ailleurs sur factus est et non moins forte. Un beau dégradé ramène alors la mélodie à la tonique où elle devient, sur le récitatif de generatione et progenie, apaisée et toute humble. Le chœur reprend pour finir la formule finale, si expressive, de la première partie.

ALLELUIA

LE TEXTE

En toi, Seigneur, j’ai espéré, je ne serai pas confondu à jamais. Dans ta justice, libère-moi. Incline ton oreille, hâte-toi de me délivrer. Ps. XXX. 2, 3.

Ces deux versets très simples ont le même sens que ceux du Graduel et nous font demander en fait la même chose : que nous soyons délivrés de tout ce qui empêche la mort du Christ, mise en nous par le baptême, de produire son effet.

LA MELODIE

Elle s’élève sur Domine en un mouvement très simple qui, après s’être incliné une nuance de vénération aimante sur la dernière syllabe, se redresse et va s’épanouir sur la tristropha de speravi. Il y met un accent qui affirme la confiance inébranlable de l’âme et qui demande déjà ce qu’elle ne dit pas encore, puis il s’achève en une cadence admirable, toute nuancée d’intime tendresse. De cette cadence, la mélodie s’élève à nouveau, assurée, forte, insistant sur non confundar ; notez la demi-cadence si ferme sur sol et tout le mot æternam qui va vers la cadence du IVe mode, prolongeant la confiance en une sorte d’évocation de l’Éternelle Bonté de notre Dieu qui sera à jamais sur nous parce qu’il nous l’a promise.

Avec la seconde phrase, commence la prière proprement dite. La première demande est très courte. La mélodie s’élève progressivement sur in justitia dont elle renforce l’accent par une distropha, mais la supplication est toute sur les quatre dernières notes de libera me ; une pour chaque syllabe. Il y a dans la nudité de cette cadence quelque chose d’émouvant. Elle est très humble, et en même temps on y sent comme la fatigue de l’âme et le poids de tout ce qui l’alourdit et la retient à la terre de concupiscence.

La troisième phrase reprend la première. C’est une prière, au lieu d’un acte de confiance, mais il n’y a entre les deux qu’une nuance, nous l’avons dit. Il faut seulement noter le mot accelera qui, par sa cadence, prend un beau caractère de pression délicate. La formule finale est très priante, comme l’est l’Alleluia qu’elle reproduit.

OFFERTOIRE

C’est celui du Dimanche de la Sexagésime.

Nous disions alors qu’il entrait dans la liturgie de ce jour soit comme paraphrase de l’Évangile, soit comme un chant d’oblation accompagnant la cérémonie de l’offrande.

Ici, il est les deux à la fois, car l’Évangile de la multiplication des pains est l’annonce de l’Eucharistie. Notre-Seigneur avait nourri par miséricorde les quatre mille Juifs qui le suivaient ; enthousiasmés ils continuèrent de le suivre jusqu’à ce qu’il leur expliquât quelques jours plus tard que ce miracle était l’annonce d’un autre pain qui serait son corps et qui donnerait la vie éternelle ; alors, ne comprenant rien à la spiritualité de ce langage, ils le quittèrent.

Il n’y a pas que des douceurs dans l’Eucharistie. C’est un sacrement qui engage. Il faut se donner au Christ pour qu’il nous incorpore à lui, et cela aussi est dur à la nature. Il faut l’aide du Seigneur pour y arriver. En donnant à cet offertoire le sens précis d’une prière pour que l’union réalisée avec le Christ ne se brise pas, on le fait entrer, sans forcer les mots, dans l’idée de l’Évangile, du sacrifice et de toute la messe.

COMMUNION

LE TEXTE

J’entourerai (l’autel) et j’immolerai dans son tabernacle une hostie de joie. Je chanterai, et un psaume je dirai au Seigneur. Ps. XXVI. 6

 

Ces mots expriment l’ardente reconnaissance de l’âme. Elle a demandé au Seigneur depuis le début de la messe de l’aider à se débarrasser des obstacles qui s’opposent à son union ave lui ; à ce moment, ils sont écartés, l’union est réalisée par le sacrement. Elle est heureuse. Elle a l’Amour. Le lien est plus serré entre Dieu et elle, elle est nourrie, elle est gardée… Elle chante sa gratitude.

LA MELODIE

Dès le premier mot, les intervalles larges et pleins traduisent le bonheur de l’âme ; un bonheur profond, mais si ardent qu’il a de la peine à demeurer dans l’intimité. La mélodie en effet se dégage, s’allège tout de suite sur immolabo. Elle s’étend un instant sur tabernaculo ejus parce que la sainteté des mots la retient, mais elle monte toujours, poussée par un souffle de joie de plus en plus intense qui la fait se développer, en une progression admirable d’enthousiasme, vers hostiam ; le mot qui dit tout, car la victime qu’elle immolera sans cesse dans la joie, c’est elle.

La seconde phrase, elle, est plus grave. Il ne s’agit plus du sacrifice, mais de la louange, qui doit être intérieure aussi bien qu’extérieure et qui requiert toujours, pour être parfaite, l’amour dont elle n’est que l’expression. Toute cette partie, notamment le mot dicam, est pénétrée de cette discrétion, de cette intimité en laquelle s’épanche sans cesse la gratitude extasiée, de l’âme qui sait aimer. 

 

Epître, évangile et préface chantés de cette messe, voir ici

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